Le processus de paix initié par Aung San Suu Kyi dans l’impasse

Le processus de paix initié par Aung San Suu Kyi dans l’impasse

La seconde conférence de Panglong pour la paix doit se tenir à la mi-mars, et Aung San Suu Kyi a récemment rappelé aux groupes ethniques armés qu’il était nécessaire de signer l’Accord National de Cessez-le-feu de 2015 pour y participer. En réponse, plusieurs groupes ethniques armés non-signataires de cet accord ont annoncé qu’ils ne le signeraient pas étant donné ses conditions. Alors, ils cherchent à s’engager dans une voie alternative aux discussions de paix sous le leadership de l’armée Wa, la plus grande force militaire non gouvernementale qui compte entre 20 000 et 30 000 soldats. Cette armée n’a connu aucun affrontement avec l’armée birmane depuis des décennies, et elle a refusé de signer l’accord de Cessez-le-feu car elle est déjà signataire d’un accord précédent qui n’a jamais été rompu. Lors de la première conférence de Panglong, les Wa avaient quitté cette rencontre car seul le statut d’observateur leur avait été accordé, une erreur apparemment logistique. Les Wa passent alors d’un rôle militaire à un rôle politique menant d’importants groupes ethniques armés. De nombreux groupes blâment cet accord de cessez-le-feu pour les disparités dues, entre autres, à sa mise en œuvre.

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© Burma2015

La semaine dernière, une rencontre s’est tenue à Panghsang, dans le nord de l’État Shan, rassemblant des représentants de sept groupes ethniques dont la Kachin Independence Army (KIA), la Ta’ang National Liberation Army (TNLA), la Myanmar National Democratic Alliance Army (MNDAA) et la Arakan Army (AA). Cette rencontre a été clôturée par la publication d’une déclaration annonçant leur intention de ne pas signer l’Accord National de Cessez-le-feu de 2015, prérequis pour leur participation au processus de paix. Ils réclament un nouvel Accord, dénonçant les bases de celui-ci. Les groupes signataires en ont profité pour renouveler leur appel à une discussion équitable pour tous les participants dans les négociations politiques et leur révocation de l’appellation d’ « organisation terroriste » qui cible les groupes de l’Alliance du Nord.

Alors, la proposition émanant de ces groupes est de former une délégation menée par les Wa, afin d’engager un dialogue politique en dehors du cadre de l’Accord de Cessez-le-feu. Leur déclaration appelait également la Chine et les Nations Unies à avoir un rôle de médiateur dans ce dialogue. Il semble alors que si le nouveau cycle du processus de paix lancé par Daw Aung San Suu Kyi via la Conférence de Panglong avance difficilement, c’est car il n’est pas si nouveau : il se base notamment sur l’Accord National de Cessez-le-feu d’octobre 2015 proposé par Thein Sein, héritier de la junte militaire. Certains groupes ethniques cherchent alors une voie alternative de dialogue politique, reste à voir si le gouvernement envisage de l’explorer.

De l’autre côté, le United Nationalities Federal Council (UNFC), une alliance qui regroupe sept groupes ethniques armés non signataires de l’accord de cessez-le-feu, a précisé qu’elle devait discuter la position de deux de ses membres qui prennent part à ce regroupement sous le leadership des Wa – et pas des moindres – : la KIA et la TNLA, d’autant plus que la KIA assure en ce moment la présidence de l’UNFC. L’UNFC a néanmoins confirmé que contrairement à ces deux groupes, elle estime que la signature de l’Accord de Cessez-le-feu peut toujours être envisagée si le gouvernement accepte ses neuf demandes. Une délégation doit rencontrer Aung San Suu Kyi la semaine prochaine afin de discuter de leur position.

Le sommet de Pangshang a également appelé à l’arrêt des offensives de l’Armée Birmane dans la région, alors que les combats se sont largement intensifiés dans le nord-est du pays au cours de ces derniers mois. Les perspectives de paix sont en effet menacées par les actes de l’armée, qui agit en toute impunité et n’hésite pas à utiliser de l’artillerie lourde. En réponse au silence du gouvernement civil, les groupes ethniques armés soulignent la fragilité du processus de paix lancé avec la Conférence de Panglong pour le XXI siècle dont le manque d’inclusion a mené droit au mur, en refusant le mode de participation qui leur est proposé et en présentant une autre voie.