Depuis plus d’un siècle, les femmes ont joué un rôle décisif pour la défense des droits de l’homme en Birmanie. Jeunes étudiantes, paysannes kachin, intellectuelles de Rangoun, ouvrières
et commerçantes, ces militantes de tous types se sont engagées contre le pouvoir autoritaire et ont aidé l’opposition à s’organiser. Comme les hommes, elles ont subi la peur et la répression.
MILITANTES SOUS LA JUNTE MILITAIRE
Aung San Suu Kyi, dirigeante de la Ligue Nationale pour la Démocratie est le symbole de cet engagement féminin. Bien qu’elle ait passé plus de 15 années, privée de liberté, elle a mené un combat pacifique pour la démocratie et est devenue le leader du parti d’opposition à la junte (NLD). C’est donc une femme, qui s’est imposée comme figure de la résistance et qui a obtenu le soutien massif et inépuisable de la population.
Bien qu’elle ait été particulièrement médiatisée, Aung San Suu Kyi, n’a pas été la seule à s’opposer à la junte militaire, ni à subir la répression. Comme elle le souligne elle-même d’autres militants ont payés plus cher leur engagement. C’est par exemple le cas de Nilar Thein, condamnée à 65 ans de prison pour avoir pris part à des manifestations contre le régime, mais aussi celui des centaines de femmes tuées en prison, pendant les manifestations, pendant les combats ou dans leur village.
Il est donc essentiel de garder en mémoire les milliers de femmes, chefs de village ou militantes, qui se sont efforcées de garantir les droits de leurs administrés, de fournir du matériel médical, de promouvoir les mouvements de femmes et de mener des actions sociales diverses, tout en subvenant aux besoins de leur famille.
Elles ont aussi mené un réel travail de plaidoyer en documentant les violations des droits de l’homme commis par le pouvoir birman, en se mobilisant pour la libération de prisonniers politiques, en soutenant le mouvement pro-démocratie en exil et en faisant passer les informations à l’extérieur du pays pour informer la communauté internationale.
D’autres plus discrètes, accomplissaient l’ensemble des petites taches, sans lesquelles les actions des hommes de leur famille n’auraient pas été possibles : financement des besoins matériel, envoi de messages, alertes, mensonges etc. Rien que le fait d’être mariée à un militant ou de rendre un service à un opposant était passible d’emprisonnement, de torture, de meurtre ou de harcèlement. Ces petites mains étaient donc réellement en danger.
LA WOMEN’S LEAGUE OF BURMA
Enfin, une quinzaine d’organisations de femmes de minorités ethniques différentes et d’objectifs distincts, se sont coordonnées au sein de la Women’s League of Burma. Ce collectif comprend par exemple la Burmese Women’s Union (BWU), la Kachin Women’s Association (KWAT) et la Karen Women’s Organization (KWO).
L‘objectif de ce collectif, très actif, est d’assurer aux femmes un meilleur statut en Birmanie, en travaillant pour une société juste et en paix. Pour cela, il met en place des programmes pour faciliter la réconciliation, mène des campagnes de plaidoyer autour des droits de chacun, développe des programmes spécifiques autour des femmes etc.
Par exemple depuis 2005, le Programme « Femmes contre les violences », a organisé des centaines de rencontres et de discussions, dans les régions ethniques en Birmanie et près de ses frontières. Ces échanges ont amené des dizaines de milliers d’hommes et de femmes à réfléchir ensemble aux violences faites aux femmes ainsi qu’aux moyens à mettre en place pour les limiter.
ÉVOLUTION DE LA PLACE DES FEMMES DANS LA SOCIÉTÉ BIRMANE
L’engagement des femmes et des organisations sous la junte militaires et sous le gouvernement de Thein Sein, a permis de favoriser la perception de la femme dans la société birmane, d’amorcer un mouvement en faveur de l’égalité des sexes ainsi que de rendre acceptable, dans l’imaginaire collectif, l’ascension sociale de tous et de toutes.
Aujourd’hui, à Rangoun, beaucoup de femmes ont troqué la tenue traditionnelle pour un pantalon ou une jupe, elles travaillent, s’informent, s’impliquent en politique, participent au débat national et sont indépendantes. En zone rurale, c’est beaucoup plus rare, mais il est certain que la place de la femme dans la société birmane a progressé et continue d’évoluer.
PORTRAIT D’UNE FEMME MILITANTE
Phyu Phuy Thin est une défenseuse des droits de l’homme qui n’a jamais hésité à critiquer le Conseil d’État pour la paix et le développement (le nom adopté par la dictature militaire après le coup d’Etat de 1988). Elle a été arrêtée plusieurs fois, pour son soutien à Aung San Suu Kyi. En 2007, elle est restée plus d’un mois en prison sans connaitre son crime. Elle avait alors été soutenue par des militants qui réclamaient sa libération et avait entamé une grève de la faim.
Elle a notamment reproché à la junte puis au gouvernement civil de sous-évaluer le nombre de personnes porteuses du VIH/Sida en Birmanie et a ouvert en 2002 une clinique à Rangoun pour accueillir, consulter et soigner les malades. En 2007, elle a reçu le « Homo Homini Award », un prix attribué à une personne, chaque année par l’ONG People in need, pour récompenser son implication pour la promotion des droits de l’homme. En 2012, elle est entrée en politique.
En savoir plus:
-Biographie d’Aung San Suu Kyi
– Site de la Women’s League of Burma :