Le Secrétaire Général des Nations Unies doit négocier l’accès humanitaire dans l’État d’Arakan

Le Secrétaire Général des Nations Unies doit négocier l’accès humanitaire dans l’État d’Arakan

20 mai 2015

37 organisations internationales humanitaires et de plaidoyer ont écrit aujourd’hui au Secrétaire Général des Nations Unies, pour l’exhorter à accorder « toute son attention » à la crise humanitaire qui sévit dans l’État d’Arakan en Birmanie et à « prendre personnellement la tête» de négociations pour autoriser l’accès humanitaire à toutes les zones de l’État d’Arakan.

Dans une lettre ouverte à Ban Ki-Moon, les ONG citent le Sous-Secrétaire général aux affaires humanitaires des Nations Unies, Kyung-hwa Kang, qui déclarait, après avoir visité les camps de déplacés internes de l’État d’Arakan en juin 2014 : « J’ai été le témoin d’un niveau de souffrance humaine dans les camps de déplacés que je n’avais jamais vu auparavant… des conditions [de vie] épouvantables… un accès plus qu’insuffisant aux services essentiels tels que la santé, l’éducation, l’eau et le système sanitaire ».

Ces mots font écho à ceux du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, la baronne Amos, qui a déclaré, après avoir visité les camps en 2012 : « J’ai vu de nombreux camps durant mon mandat, mais les conditions [de vie] dans ces camps sont parmi les pires. Malheureusement, nous, les Nations Unies, ne sommes pas en mesure d’y accéder et d’accomplir le travail que nous aimerions effectuer auprès de ces gens, les conditions [de vie] sont donc effroyables… C’est une situation désastreuse et nous devons faire quelque chose pour y remédier. »

Actuellement au moins 70 pourcent des rohingyas n’ont pas accès à l’eau potable ou à des services sanitaires. Dans le canton de Maungdaw, il y a un seul médecin pour 160 000 personnes. L’organisation mondiale de la santé recommande au moins 1 médecin pour 5000 personnes. Seulement 2 pourcent des femmes rohingyas donnent naissance dans un hôpital.

Dans leur lettre, les ONG déclarent : « alors que la crise est la plus aiguë dans les camps, il est important de noter que près de 800 000 rohingyas, qui vivent en dehors des camps, ont des besoins urgents d’assistance. Dans certaines zones, le taux de malnutrition est au dessus de 20 pourcent et la fourniture de services de santé est presque inexistante. »

Elles arguent également qu’« il est également essentiel, que l’aide humanitaire ne soit pas seulement apportée aux rohingyas mais à tous ceux qui en ont besoin. L’État d’Arakan est le deuxième État le plus pauvre de la Birmanie, 44 pourcent de la population vit en dessous du seuil de pauvreté – soit près de 20 pourcent de plus que la moyenne dans la plupart du pays. »

Les ONG concluent leur appel en rappelant les efforts de Ban Ki-moon à la suite du désastre humanitaire causé par le cyclone Nargis. Ils écrivent : « Monsieur le Secrétaire Général, en 2008, suite à l’épouvantable crise humanitaire liée au cyclone Nargis, le régime birman refusait l’accès aux organisations internationales humanitaires. Vous avez, personnellement, pris en charge l’effort de la Communauté internationale pour en négocier l’accès et vous avez réussi. Par conséquent, des centaines de milliers de vies ont pu être sauvées. Nous croyons que la crise dans l’État d’Arakan requiert une réaction similaire, nous vous exhortons, donc, à prendre, personnellement, la tête des négociations avec le gouvernement birman, en faveur d’un accès humanitaire vers toutes les zones de l’État d’Arakan, pour qu’une aide humanitaire soit apportée à toutes les personnes qui en ont besoin, indépendamment de considération de race ou de religion. Des centaines de milliers de personnes, qui n’ont que peu de nourriture, médicaments ou refuges et qui ont été dépouillées non seulement de leur citoyenneté mais également de leur dignité fondamentale, comptent sur vous et les Nations Unies pour les aider. Nous vous demandons de ne pas les décevoir. »

Une version complète de la lettre adressée au Secrétaire Général des Nations Unies est ci-dessous.

Cette déclaration est signée par les organisations suivantes : 

Actions Birmanie (Belgium)

ALTSEAN- Burma

Asia Pacific Refugee Rights Network

Association Suisse-Birmanie

Avaaz

Building Social Democracy in Burma (A project under ASD Sweden)

Burma Action Ireland

Burma Campaign UK

Burma Partnership

Burmese Rohingya Organisation UK

Children on the Edge

Christian Solidarity Worldwide

Code Pink

Equal Rights Trust

FIDH / International Federation for Human Rights

Fortify Rights

Humanitarian Aid Relief Trust (HART)

Human Rights Watch

Info Birmanie (France)

Institute for Asian Democracy

Institute on Statelessness and Inclusion

International State Crime Initiative, Queen Mary University of London

Norwegian Burma Committee

Partners for Relief and Development

Pax Christi Australia

Pax Christi International

Physicians for Human Rights

Quilliam Foundation

Refugees International

Restless Beings

Rohingya Community Ireland

Society for Threatened Peoples (Germany)

Swedish Burma Committee

Social Democratic Students Burma Project (SDS)

SHARP-Pakistan

United to End Genocide

US Campaign for Burma

———————————————————————————————————

Cher Secrétaire-Général des Nations Unies,

Nous vous écrivons en tant que représentants des organisations internationales profondément préoccupés par l’escalade de la crise humanitaire dans l’État d’Arakan en Birmanie, pour vous exhorter à redoubler d’attention sur cette situation et à user de votre influence pour inciter le gouvernement birman à développer l’accès à l’aide humanitaire internationale dans l’État d’Arakan.

Comme vous le savez, au moins 140 000 rohingyas, qui ont été forcés de fuir leur foyer après les terribles violences entre juin et octobre 2012, vivent désormais dans des camps temporaires vers lesquels l’accès humanitaire est extrêmement restreint du fait des politiques du gouvernement birman et de son incapacité à garantir un environnement sûr pour l’acheminement de l’aide. Au moins, 80 000 rohingyas ont fui la Birmanie par bateau, et font face à un destin tragique en mer à cause de la situation désespérée à laquelle ils sont confrontés dans leur pays.

Selon nos sources, au moins 70 pourcent des rohingyas n’ont pas accès à l’eau potable ou à des services sanitaires. Dans le canton de Maungdaw, il y a un seul médecin pour 160 000 personnes. L’organisation mondiale de la santé recommande au moins 1 médecin pour 5 000 personnes. Seulement 2 pourcent des femmes rohingyas donnent naissance dans un hôpital.

L’ancien Rapporteur spécial des Nations Unies pour les Droits de l’Homme en Birmanie, Tomás Ojea Quintana, a déclaré en avril 2014 :

«… la privation de soins de santé vise délibérément la population rohingya, la ségrégation constante de cette population se met de plus en plus en place. En outre, les violations des Droits de l’Homme semblent être en lien avec les politiques discriminantes et persécutrices contre la population musulmane rohingya, qui comprennent, notamment, des pratiques officielles et officieuses, de la part des autorités locales et centrales, des restrictions à l’encontre des droits à la nationalité, au déplacement, au mariage, à la santé et à la vie privée. »

La crise est la plus aiguë dans les camps de déplacés internes. En Juin 2014, le Sous-Secrétaire général aux affaires humanitaires des Nations Unies, Kyung-hwa Kang, a déclaré, après avoir visité les camps de déplacés internes de l’État d’Arakan, en juin 2014 : « J’ai été le témoin d’un niveau de souffrance humaine dans les camps de déplacés que je n’avais jamais vu auparavant… des conditions [de vie] épouvantables… un accès plus qu’insuffisant aux services essentiels tels que la santé, l’éducation, l’eau et le système sanitaire ».

Ces paroles font écho à celles du Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires, la baronne Amos, qui a déclaré, après avoir visité les camps en 2012 : « J’ai vu de nombreux camps durant mon mandat, mais les conditions [de vie] dans ces camps sont parmi les pires. Malheureusement, nous, les Nations Unies, ne sommes pas en mesure d’y accéder et d’accomplir le travail que nous aimerions effectuer auprès de ces gens, les conditions [de vie] sont donc effroyables… C’est une situation désastreuse et nous devons faire quelque chose pour y remédier. »

En octobre 2014, le porte parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires en Birmanie, Mr Pierre Peron, déclarait à propos d’un camp en particulier, le camp de Nget Chaung : « personne ne devrait avoir à vivre dans les conditions que nous avons vues à Nget Chaung ».

L’actuelle rapporteur spéciale pour la situation des Droits de l’Homme en Birmanie, Yanghee Lee, a signalé, dans son rapport de septembre 2014 à l’Assemblée Générale des Nations Unies : «  de troublants cas de décès dans les camps dus à une insuffisance d’accès à une assistance médicale d’urgence et à des maladies évitables, chroniques ou liées à la maternité. »

Tandis que la crise est la plus grave dans les camps, il est important de noter que près de 800 000 rohingyas, qui vivent en dehors des camps, ont des besoins urgents d’assistance. Dans certaines zones, le taux de malnutrition est au dessus de 20 pourcent et l’accès aux services de santé est presque inexistant.

Il est également essentiel, que l’aide humanitaire ne soit pas seulement apportée aux rohingyas mais à tous ceux qui en ont besoin. L’État d’Arakan est le deuxième État le plus pauvre de la Birmanie, 44 pourcent de la population vit en dessous du seuil de pauvreté – soit près de 20 pourcent de plus que la moyenne dans la plupart du pays.

Les organisations humanitaires ont été confrontées à de sévères restrictions, harcèlement et menaces d’expulsion de la part de l’État d’Arakan. L’acheminement de l’aide a souvent été bloqué suite aux campagnes locales menées contre les organisations humanitaires internationales.

Monsieur le Secrétaire Général, en 2008, suite à l’épouvantable crise humanitaire liée au cyclone Nargis, le régime birman refusait l’accès aux organisations internationales humanitaires. Vous avez, personnellement, pris en charge l’effort de la Communauté internationale pour en négocier l’accès et vous avez réussi. Par conséquent, des centaines de milliers de vies ont pu être sauvées. Nous croyons que la crise dans l’État d’Arakan requiert une réaction similaire, nous vous exhortons, donc, à prendre, personnellement, la tête des négociations avec le gouvernement birman, en faveur d’un accès humanitaire vers toutes les zones de l’État d’Arakan, pour qu’une aide humanitaire soit apportée à toutes les personnes qui en ont besoin, indépendamment de considération de race ou de religion. Des centaines de milliers de personnes, qui n’ont que peu de nourriture, médicaments ou refuges et qui ont été dépouillées non seulement de leur citoyenneté mais également de leur dignité fondamentale, comptent sur vous et les Nations Unies pour les aider. Nous vous demandons de ne pas les décevoir.

Très sincèrement,