Info Birmanie soutient la demande des 21 organisations Karen signataires de cet appel pour que le cas de la Birmanie soit renvoyé devant la Cour Pénale Internationale. Le 18 avril dernier, les communautés Kachin du monde faisaient de même via ce communiqué. Il est urgent que l’impunité des militaires cesse, et que les responsables présumés des violations des droits humains dans les états d’Arakan, Kachin, Shan et Karen rendent des comptes.
Lundi 30 juillet 2018
Les membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies doivent renvoyer la Birmanie devant la Cour Pénale Internationale
Les communautés Karen du monde entier rejoignent l’appel des Kachin et d’autres groupes ethniques de la Birmanie aux membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies à renvoyer la Birmanie devant la Cour Pénale Internationale (CPI).
Tant que les membres du Conseil de Sécurité permettent aux militaires birmans de ne pas être confrontés à la justice, les violations des droits humains à l’encontre de notre peuple continuera.
Nous avons été horrifié par l’escalade des violations des droits humains par les militaires dans les états d’Arakan, Kachin et Shan. Nous avons subi ces mêmes violations pendant des décennies sous les gouvernements successifs birmans, civils et militaires. Un grand nombre de ces violations des droits humains violent les lois internationales telles que définies par le Statut de Rome de la CPI. Déjà en 2002, lorsque le Statut de Rome est entré en vigueur, aucune mesure n’avait été prise par les membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies pour renvoyer la Birmanie devant la CPI et pour faire en sorte que les responsables présumés rendent des comptes.
L’échec des membres du Conseil de Sécurité à assumer leurs responsabilités et à agir pour mettre fin à l’impunité a entrainé des milliers de morts, des milliers de femmes violées et plus d’un million de déplacés à travers le pays.
En raison de ces violations des droits humains, des centaines de milliers de Karen ont été forcés à fuir leurs terres et vivent aujourd’hui dans quatre continents à travers le monde. Des réfugiés vivent toujours dans des camps en Thaïlande, vivant dans la peur constante d’un retour forcé en Birmanie avant que l’environnement ne le permette, car les donateurs réduisent leur soutien financier. Les déplacés internes ont pour leur part déjà perdu le soutien des donateurs internationaux.
Le Conseil de Sécurité n’a rien fait pour prévenir les violations des lois internationales à l’encontre des Karen et d’autres groupes ethniques. Aujourd’hui, la communauté internationale ne fournit pas l’aide adéquate, qu’elle soit alimentaire, sanitaire ou encore en matière d’abris à ceux qui ont tant souffert, preuve de cette inaction.
S’il y avait eu un mouvement pour renvoyer la Birmanie devant la CPI alors que les Karen, les Karenni, les Shan et d’autres groupes ethniques subissaient les abus des militaires il y a 15 ans, les évènements dans l’état Kachin et du nord de l’état Shan depuis 2011, et dans l’état d’Arakan en 2016 et 2017 n’auraient probablement pas eu lieu.
La rupture récente du cessez-le-feu dans l’état Karen montre à quel point le prétendu processus de paix est fragile. Depuis le cessez-le-feu dans l’état Karen, la présence militaire s’est accrue et des installations ont été construites. Ces actes démontrent que l’armée birmane n’est pas sincère quant à la paix. Les militaires continuent de refuser les changements constitutionnels nécessaires pour une solution politique durable permettant de s’attaquer aux causes profondes du conflit. La situation dans l’état Kachin depuis 2011 devrait servir d’avertissement sur ce que les Karen et d’autres groupes ethniques pourraient affronter s’ils refusent de se plier aux volontés des militaires. L’armée birmane voit l’accord de cessez-le-feu comme un nouveau moyen d’affaiblir les groupes ethniques et de contrôler leurs terres et leurs ressources et non comme une voie qui mènera à une paix durable.
Si l’armée birmane attaquait à coup d’obus de mortier les villes de Rangoun, de Mandalay ou de Naypidaw, visant écoles et habitations, venait violer les femmes et les enfants, tirer sans distinction sur les civils qui fuient, brûler les maisons et piller, est-ce que les membres du Conseil de Sécurité laisseraient faire comme c’est le cas dans les états ethniques, avec des habitations et des écoles brulées, et des femmes des groupes ethniques violées ?
« Min Aung Hlaing et ses hommes comprennent bien que le Conseil de Sécurité et le reste de la communauté internationale n’agit pas tant que ce sont les minorités ethniques qui sont visés. Plus on leur permet de s’en tirer alors qu’ils violent les lois internationales, plus ils sont audacieux, commettant toujours plus de violations des droits humains. Ce cycle de conflits grandissant et ces abus ne pourront commencer à se régler que si le Conseil de Sécurité agit pour en finir avec l’impunité des militaires » dénonce Naw K’Nyaw Paw, Secrétaire Générale de l’Organisation des Femmes Karen.
Nous appelons tous les membres du Conseil de Sécurité à soutenir publiquement un renvoi de la Birmanie devant la CPI, et de travailler afin de construire le soutien de tous les membres des Nations Unies à ce renvoi devant la CPI. Renvoyer la Birmanie devant la CPI serait l’une des mesures les plus efficaces pour réduire les violations des droits humains en Birmanie et pour faire en sorte que les responsables présumés rendent des comptes. Nous apprécions le soutien du Canada pour un renvoi devant la CPI. La décision de certains membres du Conseil de Sécurité de ne pas soutenir ce renvoi n’est pas une décision neutre : c’est une décision qui permet que les violations des droits humains des groupes ethniques perdurent, mais aussi la pérennité de l’impunité des militaires.
Signataires de la déclaration :
- Australian Karen Organization (AKO)
- Denmark Karen Organisation
- European Karen Network
- Finland Karen Culture Association
- International Karen Organization (IKO)
- Karen American Organization (KAO)
- Karen Community Association- UK
- Karen Community of Canada (KCC)
- Karen Community in Norway
- Karen Environmental and Social Action Network (Kawthoolei)
- Karen Grassroots Women’s Network (KGWN)
- Karen National Community – the Netherlands
- Karen Office for Relief and Development (KORD)
- Karen Organization of USA (KOUSA)
- Karen Peace Support Network (KPSN)
- Karen Students Network Group (KSNG)
- Karen Swedish Community
- Karen Women’s Organisation (KWO)
- Korea Karen Organization (KKO)
- Min Lwin Environmental Conservation Group (MLECG)
- New Zealand Karen Association Incorporated
Contacts presses :
En anglais,
Naw K’Nyaw Paw, nawknyawpaw@gmail.com
En français,
Camille Cuisset, coordinatrice d’Info Birmanie
camille@info-birmanie.org / 07 62 80 61 33