COVID-19 : Les migrants birmans en Thaïlande à l’épreuve de la fermeture d’usines et des frontières

COVID-19 : Les migrants birmans en Thaïlande à l’épreuve de la fermeture d’usines et des frontières

CP 24 mars 2020 – La Thaïlande, qui compte officiellement 720 personnes infectées par le COVID-19, a fermé sa frontière avec la Birmanie le 23 mars, dans un contexte d’inquiétudes croissantes relatives à la propagation du virus. La presse locale rapporte que plus de 11 000 travailleurs migrants birmans ont, ces derniers jours, traversé l’un des ponts qui relie à Myawaddy les deux pays, avant la fermeture effective. Parmi les plus de trois millions de migrants birmans que compte la Thaïlande, combien sont rentrés et/ou vont encore tenter de le faire via les voies de passage non-officielles ?

Pour se protéger d’une menace présentée comme provenant de l’extérieur, l’Ambassade de Birmanie à Bangkok recommandait le 16 mars aux millions de travailleurs birmans expatriés en Thaïlande d’y rester, d’éviter les déplacements et de ne surtout pas chercher à revenir en Birmanie à l’occasion des fêtes de Thingyan. Le 18 mars, les autorités birmanes décidaient de suspendre toute forme d’émigration volontaire légale vers la Thaïlande et demandaient aux agences de recrutement de cesser d’opérer.

De nombreux travailleurs migrants ont perdu leur emploi en conséquence de la fermeture de leur site d’emploi en Thaïlande sur fond de pandémie de COVID 19. Alors que la période de renouvellement annuel des visas se termine à la fin du mois de mars, certains travailleurs birmans affirment par ailleurs avoir fait le choix du retour en raison de l’augmentation du coût des démarches de renouvellement de visa – multiplié par plus 4 –  tandis que le coût d’un nouveau permis de travail – que le travailleur migrant doit obtenir à chaque fois qu’il change d’employeur – a été multiplié par 10. Si nombre d’entre eux rentrent en Birmanie à cause de la précarité de leur situation économique et sociale, d’autres font ce choix en pensant se mettre à l’abri du COVID-19. Jusqu’à tout récemment, la Birmanie martelait qu’aucun cas d’infection au COVID-19 n’était répertorié sur son territoire, après avoir rejeté en bloc les rapports faisant état de morts suspectes.

Dans ce contexte de retour de travailleurs birmans, les autorités birmanes tentent de mettre en place des contrôles de température lors des passages à la frontière et d’organiser le transport de ces migrants chez eux, tout en leur demandant d’effectuer une quarantaine de 14 jours à domicile. Interrogée par L’Irrawaddy, le Docteur Cynthia Maung, fondatrice et directrice de la célèbre Clinique Mae Tao, souligne les défis que représente le respect de ce confinement à domicile et appelle les populations à ne pas discriminer les travailleurs migrants, susceptibles d’être pointés du doigt dans un contexte de craintes grandissantes liées au COVID-19.

Si les camions de transports de marchandises restent autorisés à traverser les frontières, il ne fait aucun doute que la nouvelle pandémie affecte la situation économique et sociale de nombreux birmans. Les images de ces milliers de travailleurs birmans se massant à la frontière pour rentrer au pays ont pu frapper les esprits. Il est à craindre que, migrants ou pas, de nombreux birmans voient leurs vies impactées par la menace sanitaire, économique et sociale qui pèse sur un pays confronté à trop de défis. Entourée de pays affectés et dépourvue de ressources et de moyens pour faire face à une propagation du COVID-19, la Birmanie était – jusqu’à tout récemment – dans un déni total de la situation. A l’image de son déni s’agissant des violations massives des droits de l’homme commises sur son territoire.

Alors que les autorités birmanes viennent de reconnaître l’existence de deux cas d’infection par le COVID-19 sur le territoire birman – en spécifiant bien qu’il s’agit de ressortissants birmans en provenance des Etats-Unis et du Royaume-Uni – les défis énormes que pose cette pandémie à la Birmanie éclatent progressivement au grand jour.

Contact : Sophie Brondel sophie@info-birmanie.org 07 62 80 61 33