Sanctionnez l’armée, pas le peuple birman

Sanctionnez l’armée, pas le peuple birman

un communiqué de Justice for Myanmar et Burma Campaign UK

CP 5 février 2021 – Justice For Myanmar et Burma Campaign UK sont des organisations indépendantes distinctes qui ont toutes deux appelé à une action internationale contre les intérêts économiques de l’armée, conformément aux recommandations de la Mission internationale d’enquête indépendante des Nations Unies sur le Myanmar.

Nous nous opposons à toute forme de sanctions larges et non ciblées contre le Myanmar qui pourraient avoir un impact sur les citoyens ordinaires. Nous nous opposons au retrait des privilèges commerciaux, qui affectera davantage les gens ordinaires que les militaires. Nous ferons activement campagne contre ces sanctions si elles sont proposées.

Les entreprises internationales ont un rôle important à travers la mise en place de co-entreprises et d’accords commerciaux avec des entreprises militaires. Les sanctions internationales contre ces entreprises auront par conséquent un impact sur les bénéfices qu’elles réalisent pour l’armée et ses principaux généraux. Nous sommes cependant pleinement conscients qu’en elles-mêmes, des sanctions ciblées sur les intérêts économiques de l’armée ne changeront pas le comportement de l’armée. C’est une tactique, pas une panacée.

Nous appelons à une action internationale de grande envergure contre l’armée du Myanmar, en commençant par des sanctions ciblées contre les entreprises détenues et contrôlées par l’armée et leurs partenaires commerciaux importants. Nous appelons également à d’autres mesures, notamment des pressions diplomatiques, des pressions juridiques internationales et un embargo mondial sur les armes.

Bien que nous soutenions des sanctions ciblées contre des membres individuels de l’armée et leurs familles qui ont abusé de leur pouvoir et de leur position pour bâtir leur propre empire commercial, ces sanctions doivent s’ajouter à la sanction des entreprises détenues et contrôlées par l’armée et de leurs partenaires commerciaux importants. Il est essentiel que l’armée en tant qu’institution soit touchée par des sanctions internationales ciblées, et pas seulement des membres individuels.

C’est la seule manière d’aider le Myanmar à progresser vers la démocratie.

Nous nous félicitons de la réévaluation en cours de l’aide internationale au Myanmar que de nombreux pays entreprennent après le coup d’État. Il est essentiel que l’aide internationale ne bénéficie pas aux militaires. En plus d’examiner l’aide vers le régime militaire ou bénéficiant au régime, tous les donateurs devraient mettre en place des politiques visant à garantir que les organisations qui reçoivent leur aide ne la dépensent pas en biens et services de sociétés militaires. Les ambassades et les agences des Nations Unies au Myanmar devraient faire de même.

Nous appelons les donateurs à maintenir l’aide au Myanmar, en accordant la priorité aux victimes de violations des droits de l’Homme, en particulier aux centaines de milliers de déplacés internes et de réfugiés dans les régions ethniques qui ont tout perdu à la suite d’attaques militaires.

L’aide doit être sensible aux conflits, fondée sur les droits de l’Homme et ne jamais porter atteinte aux droits des nationalités ethniques à l’autodétermination. Il devrait y avoir un soutien accru aux organisations de la société civile qui travaillent sur la documentation, la défense et la promotion des droits de l’Homme. La discrimination systémique du Myanmar à l’égard des communautés ethniques et religieuses doit toujours être prise en considération. Les bailleurs de fonds doivent veiller à ce que leur soutien ne renforce pas la « bamarisation » du pays. Aucune personne ni organisation ne peut parler au nom de tout le peuple du Myanmar. Les donateurs doivent être ouverts à l’utilisation de différents mécanismes de soutien, y compris à des mécanismes transfrontaliers.

Lorsque nous appelons à l’action de la communauté internationale, c’est pour appuyer les populations du Myanmar opprimées et persécutées par les militaires, qui résistent au contrôle militaire et poursuivent leur lutte pour les droits de l’Homme, la démocratie, le fédéralisme et la paix. Cette lutte est menée par le peuple du Myanmar. Cependant, le peuple ne peut à lui seul apporter les droits de l’Homme et la démocratie au Myanmar sans le soutien de la communauté internationale, alors que des programmes et des engagements internationaux en cours profitent aux militaires et renforcent leur impunité. La communauté internationale a un rôle important à jouer pour changer d’orientation et garantir le respect du droit et des normes internationales. Un effort concerté doit être fait par la communauté internationale pour faire pression sur l’armée à la hauteur de la résistance du peuple du Myanmar à l’armée.

Il est également important de reconnaître que cela peut prendre du temps avant que l’impact des sanctions économiques ciblées et d’autres mesures prises par la communauté internationale ne se manifeste. Personne ne s’attend à ce que l’armée change immédiatement de cap le lendemain de l’imposition de sanctions économiques ciblées.

La communauté internationale doit fonctionner sur le principe suivant : tout ce qui peut être fait doit être fait. Tous les points de levier potentiels doivent être utilisés. Aucun gouvernement au monde ne peut prétendre avoir fait tout ce qu’il pouvait pour aider à promouvoir les droits de l’Homme et la démocratie au Myanmar, alors que la population est davantage opprimée et persécutée, vivant avec l’extrême violence de l’armée.

Justice for Myanmar et Burma Campaign UK continueront de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour persuader la communauté internationale d’appliquer le maximum de pression possible sur l’armée et de prendre des mesures pratiques pour appuyer les droits de l’Homme et la démocratie en Birmanie, en solidarité avec leurs alliés du monde entier.