Le retour des  réfugiés ne peut se faire sans garanties de sécurité ni de protection

Le retour des réfugiés ne peut se faire sans garanties de sécurité ni de protection

Déclaration des membres du Réseau Européen pour la Birmanie (EBN) –  Le 20 mai 2014

Les membres du Réseau Européen pour la Birmanie (EBN) sont vivement préoccupés par la situation des réfugiés birmans qui vivent dans les camps de déplacés en Thaïlande. L’insuffisance de l’aide humanitaire est en train de les pousser à rentrer chez eux de façon prématurée.

La communauté internationale et notamment l’Union européenne, met en œuvre des mesures qui pourraient forcer les réfugiés birmans à retourner chez eux alors que les conditions de sécurité ne sont pas garanties et qu’ils risquent de manquer de tout, y compris des besoins de première nécessité.

Les réformes en cours en Birmanie et notamment le processus de paix ne permettent pas encore aux réfugiés de rentrer chez eux. Même lorsque des cessez-le-feu ont été signés, aucun code de conduite n’a été mis en place pour leur application. L’armée birmane a augmenté ses effectifs dans les régions où vivent les minorités ethniques et bien que les violations des droits de l’homme commises par les forces armées aient diminué dans certaines zones, elles continuent d’avoir lieu. Le dialogue politique qui pourrait conduire à une paix durable n’a toujours pas commencé et il y a peu de chance qu’il débute prochainement.

En dépit de ces sérieuses préoccupations et malgré le fait que le nombre de réfugiés n’ait pas diminué de façon significative, beaucoup de donateurs ont utilisé les réformes de ces trois dernières années comme une excuse pour réduire les financements attribués aux réfugiés. Cela s’est traduit par une coupe du budget destiné aux rations alimentaires, aux abris, aux vêtements et autres services de base.

Dans certains cas, les financements ont été attribués aux programmes d’aide au retour des réfugiés. Toutefois, ils sont tellement sous-financés qu’ils ne peuvent en aucun cas répondre de façon adéquate à leurs besoins.

Les bailleurs ne devraient pas détourner les financements destinés aux moyens de subsistance essentiels comme la nourriture et les abris. Le retour des réfugiés devrait constituer un financement supplémentaire, plutôt que de se substituer aux financements des besoins de bases des réfugiés vivant dans les camps.

Face à la baisse des rations alimentaires et des autres services de base, beaucoup de réfugiés ont le sentiment que la communauté internationale est en train de les pousser, contre leur volonté, à rentrer chez eux. Les réfugiés se demandent même si les baisses des financements ne sont pas destinées à les affamer pour qu’ils retournent en Birmanie.

En utilisant les baisses de financements pour forcer les réfugiés à rentrer, les donateurs comme l’Union européenne font courir aux réfugiés de nombreux risques : violations des droits de l’homme, mines anti personnelles, situation d’extrême pauvreté.

Les membres de l’EBN appellent l’Union Européenne et les autres donateurs à réaffecter leurs financements à la nourriture, aux abris et aux moyens de subsistance des réfugiés et des déplacés internes en Birmanie.

Nous appelons les donateurs à reconnaitre que les réformes dans le pays n’ont pas été suffisantes pour permettre aux réfugiés de rentrer en Birmanie en toute sécurité.

 Les réfugiés consultés par les membres de l’EBN ont expliqué les raisons qui les empêchent de rentrer en Birmanie et ont demandé à ce qu’elles soient prises en compte avant qu’ils envisagent un retour.

 – Les réfugiés appellent à un retrait des troupes. Depuis que les cessez-le-feu ont été signés, il y a eu une augmentation signifiante du nombre de soldats birmans dans les États ethniques. Leurs villages et leurs maisons sont toujours occupés par l’armée birmane qui est justement responsable des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité commis à leur encontre. Les réfugiés ne considèrent donc pas pouvoir retourner chez eux en toute sécurité. Cette situation n’est pas une priorité pour la communauté internationale, qui proclame pourtant son soutien au processus de paix.

 – Les réfugiés ont exprimé leurs préoccupations quant aux mines anti personnelles toujours présentes dans leurs anciens villages et fermes. Quelques actions de déminage ont été lancées mais elles n’impliquent qu’une toute petite partie des terrains concernés.

 –  Les réfugiés veulent récupérer leurs terres. Un grand nombre d’entre eux ont dénoncé la confiscation de leurs terres et de leurs maisons par l’armée ou le gouvernement. Aucun effort n’a été fait pour résoudre cette situation et depuis que les réformes ont commencé, le nombre de confiscations de terre a même augmenté.

 –  Pour retourner chez eux, les réfugiés ont besoin de beaucoup plus qu’un programme d’accès aux moyens de subsistance. Leurs maisons ont été détruites, leurs propriétés et leurs bétails ont été pillés. Ils ont besoin d’assistance pour reconstruire leurs maisons, remplacer leurs outils, leurs semences et leurs bétails. Ils veulent une compensation du gouvernement birman pour la perte ou le vol de leurs propriétés. Aucun effort n’a été réalisé dans ce sens.

 – Beaucoup de réfugiés souhaitent rentrer dans leurs villages d’origine plutôt que dans les zones économiques spéciales où le gouvernement souhaite les installer.  Ils n’ont pas envie de devenir la main d’œuvre bon marché des usines. La pression qui s’exerce sur le gouvernement birman est trop faible pour qu’il autorise les réfugiés à choisir où ils souhaitent vivre.

 Les réfugiés ont aussi souligné le besoin de justice et de responsabilité. Ils souhaitent que les responsables des abus soient condamnés. Ils ont déclaré qu’il ne s’agissait pas de vengeance mais de justice. Aucune action n’a été mise en place dans cette direction en Birmanie. Le gouvernement ne reconnait même pas que des violations des droits de l’homme ont été massivement commises. La communauté internationale, y compris l’Union européenne, ne prend aucune mesure relative aux violations du droit international qui ont eu lieu dans le passé ni celles qui continuent aujourd’hui.

L’Union européenne et ses membres soutiennent le processus de paix en soutenant les mécanismes gouvernementaux et en suivant les perspectives présentées par les autorités.

Les groupes armés ethniques et leurs représentants politiques sont peu soutenus et presque aucune attention n’est accordée aux organisations locales et aux victimes des violations des droits de l’homme.

La paix et le retour en toute sécurité des réfugiés ne pourront avoir lieu sans l’implication des communautés affectées. Leurs voix doivent être entendues et leurs préoccupations prises en compte.

Les membres de l’EBN appellent l’Union Européenne et ses membres à écouter et à prendre en compte les préoccupations des communautés birmanes affectées par le conflit, comme spécifié dans cette déclaration.

Signataires :

Actions Birmanie – Belgium
Austrian Burma Center
Association Suisse Birmanie
Building Social Democracy in Burma – A project under ASD Sweden
Burma Action Ireland
Burma Campaign UK
Burmese Rohingya Organisation UK
Christian Solidarity Worldwide
European Karen Network
Info Birmanie – France
Norwegian Burma Committee
Polish Burma Solidarity
Society for Threatened Peoples – Germany
Swedish Burma Committee
Swedish Social Democratic Students´ Burma Project