Une spirale sans fin pour les prisonniers politiques de Birmanie

Une spirale sans fin pour les prisonniers politiques de Birmanie

Déclaration des membres du réseau européen pour la Birmanie

Pour la mise en place d’un mécanisme de surveillance des prisonniers politiques

Les membres du Réseau européen pour la Birmanie (EBN) appellent à la mise en place d’un mécanisme de surveillance indépendant pour les prisonniers politiques de Birmanie.

Nous saluons les libérations des centaines de prisonniers politiques qui ont eu ces trois dernières années. Cependant, le gouvernement birman a affirmé que tous les prisonniers politiques avaient été libérés alors que de nombreuses personnes sont toujours en prison en raison de leurs activités politiques, leur origine ethnique ou leur religion.

Le Comité de surveillance des prisonniers politiques, établi par le gouvernement birman, n’a pas mis fin au problème. La promesse faite par le président Thein Sein de libérer tous les prisonniers politiques d’ici la fin de l’année 2013 n’a pas non plus été honorée.

• Des centaines de personnes pourraient toujours être en détention ou sont dans l’attente de leur jugement et risque d’être incarcérées en raison de leurs activités politiques, leur origine ethnique, ou leur religion.

• Certaines personnes dont les dossiers ont été vérifiés par le Comité de surveillance des prisonniers politiques, n’ont toujours pas été libérées. Selon l’Association d’assistance aux prisonniers politiques (AAPPB), au moins 33 prisonniers politiques seraient toujours en prison.

• Plus de 100 personnes sont toujours poursuivies en justice pour leurs activités politiques.

• Un nombre inconnu d’individus issus de la minorité Kachin est en prison en vertu de la Loi sur les associations illégales.

• Environ 1000 Rohingyas ont été illégalement détenus à la suite des violences du mois de juin 2012. Si près de 200 d’entre eux ont été libérés début 2014, la plupart restent en prison alors qu’ils n’ont jamais eu le droit, selon les Nations Unies, à un procès équitable. 68 personnes seraient également mortes en détention. Le Rapporteur Spécial des Nations Unies a documenté l’utilisation régulière de la torture contre ces détenus.

• Presque toutes les lois répressives sont toujours en place.

• Les nouvelles lois, censées améliorer la situation des droits de l’homme, ne sont pas conformes aux normes internationales.

• La nouvelle loi, censée autoriser les manifestations, est utilisée pour arrêter des centaines de militants.

• Des centaines de Rohingyas sont en prison en raison de leur origine ethnique. 535 Rohingyas sont notamment incarcérés pour « mariage non autorisé ».

• Le président Thein Sein a montré sa mauvaise foi au sujet de la libération des prisonniers politiques : sa stratégie consiste à les libérer au compte-goutte pour gagner les faveurs de la communauté internationale au moment d’échéances diplomatiques importantes. Il a également repoussé jusqu’au dernier moment (le 30 décembre), l’annonce de la dernière amnistie qui devait, selon ses promesses du mois de juillet, libérer les derniers prisonniers politiques avant la fin de l’année. Cette approche cynique a été utilisée tout au long de l’année.

• Le gouvernement birman utilise dorénavant le harcèlement judiciaire contre les activistes : au lieu de leur infliger des peines de prison extrêmement longues (comme c’était le cas auparavant), il multiplie les arrestations arbitraires de courte durée et les amendes afin d’éviter les critiques de la communauté internationale.
• Les prisonniers politiques n’ont pas été libérés de façon inconditionnelle, comme exigé par les Nations Unies, les États-Unis, l’Union européenne et de nombreux autres pays. Le caractère conditionnel de ces libérations implique qu’en cas de nouvelle arrestation, les détenus purgeront le reste de leur peine initiale. Une stratégie clairement conçue pour les faire taire.

• Le président Thein Sein n’a jamais reconnu publiquement que les prisonniers politiques n’auraient jamais dû être détenus. Aucune excuse n’a été présentée aux prisonniers politiques libérés, aucune indemnité ne leur a été accordée, et aucune assistance médicale n’a été apportée par le gouvernement pour résoudre les problèmes de santé liés à la torture et aux mauvais traitements infligés en prison. Le gouvernement ne propose pas non plus de programme de réinsertion alors que le casier judiciaire des prisonniers politiques libérés rend l’obtention d’un travail, d’un logement ou de diplômes universitaires très compliquée.

Le Réseau européen pour la Birmanie appelle à la mise en place d’un mécanisme indépendant de surveillance des prisonniers politiques comprenant des experts internationaux.

Le comité devrait :

• Être soutenu par une législation nationale.
• Être indépendant de l’exécutif.
• Impliquer une expertise internationale.
• Impliquer de véritables représentants de la société civile, notamment des membres des différents groupes ethniques et religieux.
• Respecter les traités, conventions et pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme.
• Être doté des pouvoirs judiciaires nécessaires pour ordonner la libération des prisonniers incarcérés pour des raisons politiques, pour leur croyance, origine ethnique, religion, orientation sexuelle ou leur genre.
• Être en mesure de mener une enquête, y compris sur les cas des personnes placées en détention.
• Recevoir et étudier l’ensemble des dossiers concernant les personnes soupçonnées d’être détenues pour des raisons politiques.
• Être en mesure de contraindre la police, les forces de sécurité, l’armée, les autorités pénitentiaires et les ministères à coopérer avec les enquêtes.
• Contraindre le gouvernement à s’acquitter de ses responsabilités, notamment en obtenant un financement adéquat pour traiter le problème.
• Attribuer une compensation adéquate aux personnes injustement détenues.
• Être en mesure de dénoncer aux autorités les personnes impliquées dans les arrestations, les condamnations, les détentions ou les traitements illégaux.
• Émettre des recommandations au gouvernement et au Parlement sur l’application, la révision et l’abrogation des lois qui sont utilisées pour arrêter des individus en raison de leurs activités politiques, leurs croyances, leur origine ethnique, leur religion, leur orientation sexuelle ou leur genre.

Les membres du Réseau européen pour la Birmanie sont convaincus qu’un tel comité d’examen permanent serait un moyen efficace pour aborder la question des prisonniers politiques en Birmanie. Nous appelons à un débat constructif sur les mérites de cette proposition, et notamment sur les moyens de mise en œuvre et de renforcement d’un tel mécanisme.

Les membres du Réseau européen de la Birmanie s’engagent à continuer de travailler pour la libération de toute personne détenue en Birmanie pour des raisons politiques. Un prisonnier politique est un prisonnier de trop.

Organisations signataires :

Actions Birmanie (Belgium)
Association Suisse-Birmanie
Austrian Burma Center
Building Social Democracy in Burma (ASD Sweden)
Burma Action Ireland
Burma Aktion (Germany)
Burma Campaign UK
Burmese Rohingya Organization UK
Info Birmanie
Polish Burma Solidarity
Social Democratic Students´ Burma Project, Sweden
Swedish Burma Committee